En attendant Godette
Alain Valcour
Théâtre érotique
et philosophique
Personnages :
Casimir, 40-50 ans,
manchot des deux bras,
Patagon, 30-35 ans,
Godette
/ Colette Martin, 30 ans, africaine.
Musiques : Erik Satie : « Gymnopédie ».
Carmen : « L’amour est enfant de Bohême »
Autres sons : Bruits de ville au loin,
circulation, freinages brusques, ambulances.
Gémissements
de plaisir féminin.
La scène : en extérieur, deux bancs de jardin,
ambiance d’automne triste, grisaille.
Les vêtements
de Casimir et Patagon sont élimés, trop grands, visiblement fournis par une
association de charité.
oOo
Scène
1 : Casimir est assis sur un banc au
centre de la scène, face aux spectateurs et Patagon sur l’autre banc, sur un
côté de la scène, comme en retrait.
Casimir :
Patagon, quelle heure est-il ?
Patagon :
4 heures 8.
C. : Elle va venir,
c’est sûr. Hier, elle a eu un empêchement de dernière minute. A 6 heures, il
faisait déjà presque nuit.
[Long silence]
C. :
Quelle heure maintenant ?
P. : 4
heures 11.
C. [Sentencieux]:
Le temps prend son temps, même si on n’a pas trop envie de lui en laisser.
P. : Oui.
[Bruit de
moteur, assez loin.]
C. : Une
voiture. Va voir, ça doit être elle.
P. [Se
retourne] : Non.
C. :
Patagon, t’as pas baisé depuis combien de temps ?
P. : …
C. :
[Rêveur]
Et la peau
blanche de ses cuisses ! Et les boucles cuivrées qui entourent sa chatte rose pâle !
…
Patagon, t’as
déjà baisé une rousse ?
P. : …
C. : T’as
déjà goûté le jus de chatte d’une rousse bien chaude ? T’as
déjà sucé les replis de peau
transparente qui pendouillent entre de grosses lèvres roses, à peine couvertes d’un fin duvet soyeux
couleur de miel ?
…
Ah les
rousses ! Il y en a des poèmes à écrire !
P. : …
C. :
Patagon, t’as déjà pincé entre tes lèvres le bourgeon délicat d’une pucelle de
13 ans qui crie du plaisir nouveau qu’elle découvre entre tes mains
puissantes ?
As-tu planté
ta queue, dure comme manche de pioche dans un ventre tout neuf ? Non, bien sûr, ta queue à
toi est toujours molle.
P. [Haussement
d’épaules]
C. :
As-tu jouis du cri aigu qui signale
une défloration sans bavure et
léché jusqu’à la dernière goutte, sur des cuisses fraîches et innocentes le sang de la première fois ?
… [Lourd
silence]
D’accord,
C’est pas plus mal, on en profitera tous les
deux.
…
Quelle heure
maintenant ?
P. : 4
heures 28.
C. : Même
pas la demie ! Elle en met du temps
[Rire]
…
Elle a des
gros seins
[Rire triste.]
C. : A
pleines mains tu lui malaxeras les seins, tu lui pinceras bien fort les
tétons, et pour l’empêcher de crier je
lui mordrai la langue. Je lui lécherai
les seins, le ventre, les cuisses, le trou du cul, elle gémira de plaisir, elle
nous sucera tous les deux.
P. : [Silenceux et résigné]
C. :
Quand elle se caresse
P. :
Ah ?
C. :
Quand elle est en rut, elle s’oublie et
tout un régiment de tirailleurs peut la couvrir. Elle adore et elle en
redemande.
…
…
Patagon, t’es
raide ?
P. : Non.
C. :
Pourtant, j’ménage
pas mes efforts.
[L’éclairage
de la scène baisse progressivement.]
C. : Deux
mois qu’on l’attend
P. :
C’est sûr.
C. : Au
fond, l’attente c’est
pas plus mal. Ça donne de la valeur à une rencontre. Ce qu’on a tout de suite
ne vaut rien. L’Erotisme de l’Attente ! Quel poète sait en parler ? Valcour, bien sûr.
… [Silence
réfléchi]
C. : Ça
m’rappelle quand j’étais jeune … quand j’avais
mes deux bras. [Rêveur] Rue Saint-Denis.
J’allais voir une fille, Fanny, toujours la même. Pourquoi elle ? Parce
que sa piaule était au cinquième et que la « montée » durait plus longtemps que pour les autres.
…
[Rêveur] Monter
derrière une fille !
…
Derrière elle,
dans l’escalier très raide et qui puait les chiottes bouchés et le bois
crasseux, je gardais les yeux au niveau de ses fesses qu’elle balançait de façon
prometteuse. J’adore l’odeur des vieux
escaliers, ça m’rappelle la rue Saint-Denis.
…
De bonnes grosses fesses de pute serrées dans
une jupe très courte. Une jupe qui laissait voir un grand morceau de cuisse blanche et
celluliteuse, au dessus des bas noirs. Et comme cette fille avait du succès, je
devais toujours l’attendre, harcelé par
les autres qui voulaient me « monter ». « Mais qu’est-ce qu’elle
a d’mieux que nous cette Fanny ? » protestait l’une en découvrant un téton brunâtre qui couronnait un gros sein
flasque. « Pour toi, j’t’le fais à
60 francs, j’serai bien gentille avec mon gros bébé. » Je préférais
attendre Fanny, la tête haute, sans raser les murs comme le font tous les
hommes en haut de la rue Saint-Denis.
[Longue pause
philosophique et péripatéticienne]
Sans
l’attente, y a pas de puissant désir, et sans puissant
désir, y a pas de plaisir. Qu’est-ce
t’en dis, Patagon ?
P. :
Bof !
C. :
Comme je n’avais pas beaucoup d’argent, je mettais chaque jour dans une
enveloppe un billet de 5 ou 10 francs. Pour ma visite suivante à Fanny. Je glissais
voluptueusement le billet dans l’enveloppe, comme le moment venu j’allais
glisser ma main dans sa culotte.
P. :
… [Soupir las ; mais Casimir
continue, imperturbable]
C. :
Comme j’étais un habitué, son « lapin chéri » qu’elle disait, Fanny
me prenait sans capote. Mais je devais ensuite la nettoyer. Elle
s’accroupissait sur mon visage, et sa chatte me rendait mon foutre, mêlé
peut-être à celui d’autres clients. Ma langue se faufilait à travers un buisson
de poils noirs et fouillait les replis
de chair tendre pour faire disparaître le foutre jusqu’à la dernière goutte.
…
Bon, quelle
heure il est maintenant ?
P. : 5
heures 42.
C. : Ben
moi, j’suis raide. Patagon, tu m’branles ?
P. : …
[Hoche la tête sans que l’on sache si cela veut dire oui ou non.]
C. Tu m’fais
bien pisser, tu peux bien m’branler.
Patagon se
lève, introduit sa main dans le pantalon de Casimir. La lumière baisse de plus
en plus et s’éteint.
oOo
Scène
2 : Il fait nuit. Une lumière glauque vient d’un
lampadaire isolé, au fond de la scène. Casimir dort allongé sur son banc.
Musique de Satie.
Une femme, qui
n’est pas rousse mais noire - on dira néanmoins que c’est Godette - entre en scène, vêtue seulement d’un paréo
transparent. Elle danse devant Patagon. Ils s’embrassent amoureusement, se
caressent et rient en silence comme des amants complices, pour ne pas réveiller
Casimir. De temps en temps, Godette s’approche
de Casimir, lui caresse le visage avec
ses seins nus. Elle glisse un téton
entre ses lèvres. Toujours en silence, Patagon fait mine d’être jaloux.
Elle revient à lui, continue de danser, toute nue. Godette
retourne à Casimir, lui tâte le sexe à travers le pantalon et montre en
riant à Patagon comme il est dur. Elle
retourne près de lui. Ils s’embrassent encore. L’obscurité devient totale. La
musique de Satie est remplacée par des gémissements féminins de plaisir.
oOo
Scène
3 : Comme à
C. :
Patagon, j’ai fait un rêve ! Un grand rêve. Tu veux que je te le
raconte ?
P. :
Mouais… [Il émerge d’un mauvais sommeil]
C. : Je
suis un petit garçon. Je tête le sein d’une femme noire. C’est une grosse mama
avec des seins pleins de lait qui coule
sur mes joues, dans mon cou. Je suis trempé. Elle rit d’un grand rire de gorge
maternel et chaleureux. Elle commence à me sucer. Ma petite queue enfantine se
met à grossir démesurément. La noire
continue de rire.
Je me retrouve
ensuite à une visite médicale scolaire, face à une femme rousse d’âge plus que
mûr, qui examine avec intérêt mon énorme
sexe, douloureux de raideur. Je me dis
que c’est peut-être ma mère, mais je n’arrive pas à savoir. Elle montre ma verge bandée à son infirmière, une japonaise, toute nue sous
sa blouse ultracourte, qui rit comme une gamine excitée. Je ne peux détacher les yeux de son buisson
de poils noirs et de ses tétons sombres, bien visibles à travers le tissu
transparent. « Mais regardez-moi » crie la doctoresse. Je n’arrive pas à la regarder. Mes yeux sont
fixés sur l’autre. « Vous avez vu ce morceau. » La japonaise glousse de
plus belle. « On va couper ça. Attachez-le moi ! »
L’infirmière sort une corde en
coton rouge, comme celles qu’utilisent
les artistes de « Shibari » (l’art
japonais du ligotage). Elle s’apprête à
m’attacher sur la chaise.
Je me retrouve
alors dans une ambulance, tout seul avec l’infirmière japonaise qui m’embrasse
affectueusement. Je remarque sa longue chevelure d’un beau noir de jais, ses grands cils et ses lèvres très fines. Je
me dis qu’elle a un visage de poupée.
L’ambulance roule très vite, la route est sinueuse, c’est en montagne. J’ai peur. La japonaise me
caresse le sexe toujours aussi raide. L’ambulance quitte la route et dévale une
pente raide. Elle fonce vers des arbres
et des rochers.
La scène
change encore. Je suis ligoté sur une chaise et j’entends, derrière un
paravent, un couple qui fait l’amour bruyamment. Je ne la vois pas, mais je
sais que la femme c’est Godette. Je reconnais sa
façon de jouir et ses cris haletants. Je suis triste qu’elle me trompe.
P. : Eh
bien !
C. :
Comme tu dis. Heureusement qu’on a des rêves.
Ça remplit la vie.
[Silence]
Une vie sans
rêves érotiques, c’est comme … [il cherche une formule] … c’est comme une femme
aux seins plats.
C. :
Patagon, tu me fais la lecture. T’as dans la sacoche les œuvres complètes
d’Alain Valcour. T’as qu’à ouvrir au hasard.
P. : [Il commence à lire]
« Hommage à la mère »
C. : Oui, c’est très bon.
P. : Comme beaucoup
d'enfants, j'ai appris à m'enivrer de l'odeur de femme chaude dans le lit de ma
mère. C'est pour lui rendre hommage, et pour revivre par l'écriture la chaleur
des hommages dont je l'ai honorée, que j'écris ces souvenirs de mon enfance.
J'avais huit ou neuf ans et ma
soeur, deux de plus. Notre père partait travailler
très tôt car nous habitions dans une triste banlieue mal desservie par les
transports.
Lui parti, l'obscurité
revenue, ma soeur et moi allions rejoindre aussitôt
notre mère dans son lit. Elle tentait de prolonger son sommeil, nous nous
installions chacun d'un côté, et moi toujours à sa droite pour que ma main
droite soit libre de se poser sur son ventre, de caresser ses seins et de
s'aventurer jusqu'à ses cuisses.
Un rituel s'était instauré.
Nous écoutions d'abord sa respiration, avec un respect religieux. Je me
laissais envahir par sa chaleur. Sa courte chemise de nuit était toujours
retroussée, et je me collais au plus près de sa cuisse nue.
J'aimais par dessus tout ses odeurs.
L'odeur de son cou, l'odeur de sa chevelure, différente, un peu savonneuse,
l'odeur des touffes noires et soyeuses de ses aisselles, plus acide, et même
l'odeur de pet qui imprégnait les draps. Elle avait l'habitude de replier ses
bras sous sa tête, ce qui dégageait un buisson moite où j'enfouissais mon nez
avec délices. Je suis maintenant convaincu qu'elle aimait me sentir la humer.
Mais à l'époque, je saisissais la chance sans me préoccuper de ses arrières
pensées.
C. : Ce Valcour, quel vicieux ! Et quel beau style !
P. : [Reprend son souffle
et continue.]
Ma soeur
de son côté promenait sa main gauche sur le ventre rebondi, posait des baisers
baveux sur ses épaules et au creux de son cou, tirait sur le nylon crissant
pour le tendre sur les seins. Dans la pénombre on distinguait les tétons bruns,
gonflés, pointus comme pour percer le tissu.
Notre rituel se déroulait en
plusieurs temps. Tout d'abord en silence, l'imprégnation par les odeurs et
l'écoute du sommeil en train de se dissiper. Ensuite, quand la respiration
indiquait l'approche du réveil, nous lui
prodiguions des caresses plus insistantes, pour l'empêcher de se rendormir.
Rapidement, elles se transformaient en chatouilles.
-- Laissez-moi dormir!
Mais c'était trop tard, le
grand jeu commençait. A la faveur de ses mouvements de résistance, je
m'emparais de ses seins. Elle avait de grands seins, flasques comme des gourdes
basques à moitié pleines, couronnés d'aréoles brunes. Pas aussi parfaits que
les seins siliconés des pin-ups, mais je les aimais
bien ces seins qui nous avaient, ma sœur et moi, bien longtemps allaités.
C. : Un poète ce Valcour ! On s’y croirait. Mais d’ici qu’on l’foute en
taule, comme ce pauvre Polanski ! Victime de l’obscurantisme puritain et
de l’hystérie antipédophile! À sa place je me méfierais.
P. : [Continue la
lecture.] Trèves d'attendrissement
laitier. Ma soeur fut la plus hardie, et c'est elle
qui fit évoluer le rituel. Lors d'une série de chatouilles appuyées, notre mère
poussa un long gémissement issu du plus profond de sa gorge, et son dos se cabra.
J'eus peur pour elle d'une crise de quelque maladie nerveuse, mais je vis que
la responsable était ma soeur qui fouillait
vigoureusement son bas-ventre, et que ses gémissements étaient en phase avec
cette caresse insolite. J'arrêtai alors mes propres caresses, saisi de respect
face à une manifestation de possession que je ressentais comme sacrée et
attentif à me laisser moi-même envelopper par les ondes de sa jouissance. Je
m'aperçus que je bandais. Je frottai mon petit membre raide et douloureux contre
l'ample et grasse cuisse maternelle, j'étais tétanisé par sa jouissance. Vint
la détente. Ma main était posée sur sa cuisse, près du lieu stratégique que ma soeur avait investi. Ma joue collée contre un sein tiède et
moelleux, j'enregistrais avec émotion tout ce que manifestait son corps:
soupirs, frémissements, palpitations, et je cherchais à éprouver ses
sensations.
Pourquoi une larme se mit-elle
à couler sur sa joue, jusque sur mes lèvres ?
Nous nous mîmes à l'embrasser
dans le cou, sur les épaules, sur les paupières, à mordiller ses oreilles, à y
enfoncer nos langues, ce qui la fit sortir de sa torpeur, alors que je
reprenais mon inlassable exploration de son ventre et de ses seins.
--- Vous êtes des diables.
Mais c'est l'heure de l'école!
Panique, lever précipité,
départ pour l'école.
Le rituel se trouva enrichi.
Mais ma soeur s'arrogeait le rôle de prêtresse
officiante : elle éloignait ma main avec autorité chaque fois que je tentais
d'approcher la broussailleuse source de jouissance.
-- Non-on, murmurait notre
mère chaque fois que la main branleuse de ma soeur
montait trop haut. Mais ce qui avait été admis une fois fut à chaque fois
répété.
Ma soeur
et moi partagions la même très petite chambre, et bien sûr je souhaitais
manipuler son conin glabre, tout comme elle
manipulait le buisson maternel. Mais elle refusait absolument de me laisser la
toucher. Elle n'hésitait pas à rugir et à griffer comme une panthère si je le
tentais.
-- Laisse-moi te caresser, je
ferai très doucement.
-- Quand j'aurai des poils.
-- Montre-moi tes poils.
-- Y en a pas.
J'approchais mes yeux à
quelques centimètres de son bas-ventre où je cherchais tous les matins
l'apparition de quelque poil, signe avant-coureur de sa disponibilité à mes mains
désirantes. Respectueux du pacte, je préférais sacrifier le toucher au profit
de la vue et de l'odorat, mais il faut bien dire que je ne retrouvais pas sur
elle la puissante odeur de femelle que dégageait le corps jouissant ou alangui
de notre mère.
Sauf le dimanche, jour de
messe et d'ennui, les séances matinales continuaient de plus belle. Notre mère
faisait semblant de se défendre de nos chatouilles. Elle s'emparait du paquet
de mes toutes petites couilles et de ma bite raidie, et le serrait pendant que
je lui pinçais un téton. A qui supporterait le mieux la "douleur"
infligée par l'autre. Le premier qui criait grâce avait perdu.
Venaient ensuite les claques.
Notre mère s'allongeait sur le ventre et nous offrait, par défi, ses fesses à
claquer. Chacun de nous s'occupait d'une de ses grandes fesses blanches. Elle
se trémoussait mais ne protestait pas, même lorsque ses fesses et ses cuisses
atteignaient l'écarlate d'une langouste ébouillantée. Les fessées qu'elle nous
donnait (rarement) n'étaient que caresses à côté de celles qu'à deux, nous lui
donnions.
Las de claquer ses fesses,
nous nous mettions ensuite à implorer leur pardon en les baisant et en les
caressant, sans arriver à nous retenir de les malaxer comme deux grosses boules
de pâte à pain. C'est moi qui eut l'audace un matin, de les écarter
franchement, et le coeur battant à rompre, de plonger
un doigt dans l'oeillet brun et plissé. Protestations
peu énergiques de sa part et nouvelles claques administrées par mon adorable
complice. Un doigt, puis deux, et l'habitude fut prise de terminer le jeu par
une vigoureuse exploration du cul maternel.
Quand l'heure venait de se
lever, elle nous baisait à pleine bouche, chacun notre tour, en mordillant nos
langues.
-- Vous êtes de vrais démons. Mais c'est l'heure
de l'école !...
C. : Vraiment très bon. Ça t’a pas fait bander ?
P. : Si !
C. : Ah ! J’me
disais bien. Ce Valcour,
i’f’rait bander un eunuque.
[Très long
silence]
C. :
Patagon, t’as déjà baisé une lycéenne japonaise ?
P. : Non.
C. : Et
bien, t’as raté quelque chose. Vois donc le tableau si t’as un tant soit peu de
cervelle. Six gamines en uniformes scolaires, en mini-jupes de tissu écossais,
chemisiers blancs transparents et cravates assorties aux jupes. Elles se lèvent
et crient en chœur deux ou trois fois « I-la-chaï-masei ». Tu en choisis une. Elle rougit de plaisir, et
les autres, nullement dépitées, crient toutes ensembles « Bye,bye. Sayo-onala ». La maquerelle, qui ne manque pas d’être
excitante dans une robe noire échancrée de partout qui ne cache rien de ses
rondeurs quarantenaires, vous conduit tous les deux à une chambre munie d’une
porte double et de murs capitonnés. Elle te montre ce détail et désigne la
fille : «Youkiko,
bade gâle, veli nauti, goude spanque »,
tout en soulevant sa jupe pour te
montrer sa paire de fesses rebondies.
Tu la
déshabilles, tu lui pinces les tétons. Elle gémit, tu insistes, elle gémit de
plus belle. Ça t’excite, même si les gémissements sont semi-professionnels. Tes
claques s’abattent sur ses fesses comme une averse de grêle. Les gémissements
font place aux cris mêlés de sanglots.
« No-o, pli-ize, pli-ize ». Tu la maintiens sur le
« futon », à plat ventre, les cuisses écartées. Ta main rebondit sur
la chair élastique. Les fesses et les cuisses sont déjà très rouges. Youkiko pleure vraiment. Tu glisses deux doigts entre les
fesses endolories, jusqu’à l’œillet qui les accueille, qui les attend, bien
garni de vaseline. Tu fouilles son cul. Tu crois violer une chair adolescente,
mais Youkiko aime visiblement cette caresse
tendrement brutale. Trois doigts dans
son cul, ton pouce au fond du vagin. Elle gémit. Est-ce toujours de
plaisir ? Ta main libre applique de nouvelles claques. Elle agite les
jambes. Elle serre les fesses et cherche
à les écarter de la nouvelle volée qui s’abat sans répit. Tu la maintiens
fermement par ses deux orifices. Elle
pleure. Tu la retournes comme une crêpe et tu l’enfiles. Elle te sourit. Tu
prends le temps de lécher ses larmes. Vos langues se joignent et se lutinent. Vous vous mordillez les lèvres et la langue. Tu la pistonnes, elle gémit, comme si c’était
la première fois qu’elle se faisait sauter. Comme si tu la violais. Ses
gémissements t’excitent. Tu la pénètres à fond. Son vagin de coquine
expérimentée te serre et tu jouis. Elle continue à gémir, mais plus doucement, comme pour te dire que son
plaisir continue.
La passe est
déjà payée mais tu lui donne un billet.
Elle te suce voluptueusement la langue. « Come euguè-ïne. Youkiko, bade gâle, nauti gâle »
et elle te montre ses fesses encore très rouges.
P. :
[Semble un peu remué, mais garde le silence]
C. : À
quoi sert ta vie si t’as pas goûté ça ? Hein !
P. :
[Haussement d’épaules]
C. : Tu dis rien. … Mais tu sais que j’ai raison.
[Longue pause]
C. : Et
le suicide, tu y as déjà pensé ?
Quand on a une vie nulle comme la tienne… ! Même pas capable de baiser … ! Moi, à ta
place, j’y réfléchirais sérieusement. …
Enfin, tu m’aides à pisser. C’est déjà ça.
[Profonde
réflexion d’où émerge la sentence définitive qui suit, énoncée solennellement ]
…
Alors, sinon,
tu vis par routine. Tu continues à
pousser un chariot trop lourd sur une
route qui mène à rien !
...
Quelle heure
il est ?
P. : 11
heures 48.
C. :
[Fort] Godette, on t’attend ! On attend tes cuisses charnues et tes grosses
fesses molles.
[Moins fort]
On veut l’odeur de ta chatte rousse qui pue la pisse,
la sueur, la cyprine et le sperme des types qui t’ont sautée au quatrième
sous-sol d’un parking craignos.
…
[Longue
méditation peu transcendantale comme l’indique ce qui suit.]
C. :
Patagon, t’as déjà violé une femme ?
P. : Non.
[Ton affligé ; la question est
incongrue. Mais Casimir poursuit. ]
C. : Et
bien on va rattraper ça.
C’est même pas sûr qu’elle se débatte
beaucoup. Quand elle me sentira en elle, elle se trouvera toute cotonneuse.
Soumise à ma virilité. Tu lui pinceras les tétons pour la faire crier sous son
bâillon. Ça sera ton tour ensuite. Et j’lui en remettrai un. Le deuxième coup
c’est toujours le meilleur.
[Silence]
Qui dira la
beauté d’un viol bien mené. Sans brutalité, tout en souplesse. Et pour ça,
c’est mieux d’être à plusieurs.
[Casimir
continue. Les bruits de circulation augmentent et couvrent sa voix. Ses lèvres
bougent mais l’on n’entend plus rien. Patagon est de plus en plus accablé. Le
soir tombe, comme à la fin de
Scène
4 : Il fait nuit. Comme à
Musique de Satie.
Godette
revient « vêtue » de son paréo transparent. Elle cherche
Patagon. Elle erre tristement et danse autour du banc de Patagon, comme pour le
faire revenir. Puis elle quitte son paréo, continue à danser nue devant Casimir
endormi. Elle lui caresse le visage avec
ses seins et ses tétons. Elle lui tâte le sexe qui se dresse. Elle s’agenouille
devant Casimir et le suce. Elle se relève et le masturbe vigoureusement. Le
sperme gicle en direction des spectateurs.
[Cris de
surprise dégoutée des spectatrices arrosées.]
Obscurité.
Casimir pousse un grand cri, comme si on l’égorgeait.
Scène
5 : Il fait jour.
Casimir, à moitié nu est allongé sur son banc. Patagon le regarde,
étonné. Il tourne autour sans le
toucher.
Entre en scène
de la ci-devant nommée « Godette » , en uniforme de policière. Elle sort un bloc-notes de son porte-documents.
Elle : Je
suis Colette Martin, de la police
judiciaire. Je viens pour le constat.
[Elle examine
le corps. Elle approche ses lèvres de la bouche entr’ouverte de Casimir, elle manipule ses paupières.]
Elle : Il
est bien mort.
[Elle tâte le
sexe mou]
Elle : Il bande même pas. Il est mort comme ça ?
P. : Il débloquait
grave.
Elle : On
n’en meurt pas.
P. : Il
faisait des rêves éprouvants.
Elle : On
n’en meurt pas non plus. Qu’est ce que vous faisiez avec lui ?
P. : Je
le faisais pisser, bouffer. Je lui
faisais la lecture. Des trucs pornos. Et
j’écoutais ses salades, il était complètement obsédé. Sexuel, je veux dire.
Elle :
J’avais compris. C’est vraiment
tout ?
P. : Je
l’branlais aussi parfois.
Elle :
Vous êtes soigneux ! Son pantalon, c’est vous qui
l’avez plié ?
P. : Pas
hier soir. Hier il a déliré toute la journée. Il attendait une femme. Elle est
peut-être venue.
Elle [ lit ce qu’elle écrit] : « Délires et obsessions
sexuels. Masturbations fréquentes pratiquées par des tiers vu l’infirmité du
sujet. Arrêt cardiaque suite à un orgasme violent. »
Bon, ça ira
pour lui. Mais vous êtes aussi dans le
coup. Pour mon rapport, j’ai besoin de mieux vous connaître.
[Son ton se
fait mielleux. Elle approche son visage
de celui de Patagon, le regarde droit dans les yeux. Elle lui tâte le sexe.]
Elle :
Vous au moins, vous avez l’air sain.
Sexuellement je veux dire.
P.: J’avais compris.
Elle : Il
faut que je m’en assure.
[Ils se
déshabillent mutuellement. En sourdine, l’air
de Carmen, « L’amour est enfant de Bohême »
. Ils se caressent et s’embrassent avec précipitation. Colette
Martin présente ses fesses aux spectateurs. Jambes très écartées. Elle est
inclinée au dessus de Casimir, et
s’appuie au dossier du banc. Patagon la
pénètre brutalement. Son va-et-vient est rapide. Ils jouissent.]
Fin de la
pièce. Obscurité. Lumière. Les trois acteurs sont debout, plus ou moins nus,
comme à la scène finale. Applaudissements. Saluts. Rappels. Casimir s’adresse
aux spectateurs.
C. :
Merci à toutes et à tous d’être venus et d’avoir écouté mes
« salades d’obsédé sexuel » comme a dit ce cher Patagon.
Merci à notre
metteur en scène, Maurice Du Rocher, à notre auteur Alain Valcour
et à Samuel Beckett.
N’hésitez pas
à envoyer par courrier électronique à Valcour (avalc@free.fr )
vos fantasmes les plus obscènes et vos rêveries les plus salaces. Il en
fera bon usage.
Notes : (1) La jeune fille et la mort, 1994.